samedi 17 novembre 2012

Anton Alferov


Aujourd'hui, j'ai besoin de me vider le coeur et la tête, et je vais en profiter pour dénoncer une injustice qui me fait mal aux tripes depuis deux semaines, et encore plus depuis deux jours.
 
Le premier boulot que j'ai trouvé en arrivant au Québec il y a quatre ans, c'était en cuisine au Cirque du Soleil pour le spectacle Ovo. Mon équipe et moi, on nourrissait artistes, techniciens, entraîneurs et autres employés. La plupart des artistes étaient simples et accessibles, comme Anton, 30 ans, trampoliniste. J'avais remarqué tout de suite que c'était le seul Russe de la troupe qui parlait aussi anglais. Comme j'ai étudié sa langue maternelle pendant plusieurs années lors de ma scolarité, et que je n'avais jamais vraiment eu l'occasion de parler avec un « vrai » Russe, je lui ai un jour adressé la parole dans sa langue, ce qui l'a beaucoup surpris. Petit à petit, c'est devenu comme un jeu entre nous, il me faisait parler russe, me corrigeait et ne se gênait pas non plus pour se moquer un peu parfois !

C'était un garçon simple, gentil, plein d'humour, costaud et très bien bâti (forcément), charmeur. Ne vous méprenez pas, il n'a jamais été question de relation intime ni même d'attirance, j'aime autant que ça soit clair. Il ne m'a jamais raconté sa vie personnelle, simplement qu'il avait deux jeunes enfants qui vivaient avec leur mère en Russie. Il était sain de corps et d'esprit, ça se voyait bien, ce qui ne l'empêchait pas de savoir faire la fête à certaines occasions, pour son anniversaire par exemple, auquel il m'avait invitée. C'est d'ailleurs lui qui m'a fait découvrir le Jägermeister-coca, un des trucs les plus absolument infâmes que j'ai bus dans ma vie. Il était mort de rire. Bref.

Je ne peux pas vraiment dire que nous étions amis, ça serait exagérer, mais on a beaucoup parlé, échangé et surtout ri pendant les six mois que la troupe a passés à Montréal. Après chaque spectacle, il me demandait de lui préparer un mélange atroce fait de gousses d'ail fraiches et de miel, en me certifiant avec un grand sourire que c'était bon pour le coeur. Mouais. Admettons. 

Il y a deux semaines, j'ai appris son décès.

La mort d'un homme si jeune, plein de rêves, de projets et de vie, c'est toujours quelque chose qui me touche, tellement je trouve ça anormal. Il y a tellement de vieux cons qui vivent jusqu'à 90 ans ! Que ça arrive à quelqu'un comme Anton, ça me fait encore plus de peine. Mais ce qui m'a vraiment secouée, traumatisée même, ce sont les circonstances dans lesquelles il est décédé.

Depuis quelques mois, il vivait à Acapulco, au Mexique. Il avait monté une école de cirque, donnait des cours gratuits aux gamins du coin, s'impliquait beaucoup dans ce projet. Pendant le week-end du 28 octobre 2012 et pour une raison que j'ignore, il s'est fait arrêter par la police mexicaine. Il a peut-être fait une connerie, je n'en sais rien. Et je m'en fous, à vrai dire. 

Ce que je sais, c'est qu'il n'a jamais revu la lumière du jour. Il est mort sauvagement battu par les policiers, qui essayent depuis de camoufler ce meurtre sordide en suicide. Les autorités mexicaines disent qu'Anton est subitement devenu fou et incontrôlable et qu'il s'est lui-même fracassé la tête contre les murs de sa cellule. Après, ils ont changé de version, préférant dire qu'il s'était battu avec d'autres prisonniers. Là encore, impossible pour moi de savoir ce qui est vrai. Par contre, ce que j'ai vu de mes yeux, ce sont des photos du visage d'Anton après son décès, des photos de la cellule dans laquelle il a séjourné et a vécu ses dernières heures. Il était à peine identifiable, plein de contusions. Je ne suis pas médecin, mais personne ne me fera jamais croire qu'une personne comme lui peut s'infliger de telles souffrances. Quant aux murs recouverts de sang dans la cellule, même dans les films les plus lugubres je n'ai jamais rien vu de tel. Un vrai cauchemar, putain. Non contente du résultat obtenu, la police a ensuite travaillé très dur pour empêcher les proches et la famille d'Anton de connaître la vérité. Son corps n'a pas été conservé correctement, ils ont même voulu imposer une crémation, pour être certains qu'aucune preuve de ce massacre ne subsisterait.

On pourrait penser que personne ne peut rien faire pour aider un type qui se fait arrêter par la police (corrompue) au Mexique, et on a la preuve que c'est la vérité. Il y a quelques jours est apparue sur YouTube une vidéo d'Anton juste après son arrestation. On n'y voit aucune violence physique, pas même un contact entre les policiers et leur proie. Pourtant, cette vidéo m'a encore plus choquée que les photos que j'ai vues. On y voit Anton qui a peur, qui appelle au secours en pleine rue, attaché à la voiture de police. Le plus marquant, c'est de voir et d'entendre un type de 35 ans complètement paniqué, qui appelle sa mère. Sa mère. Comme un réflexe. Danger = maman. Il appelle en russe, en espagnol, il crie qu'on va le tuer, et personne ne bouge. Comme un présage, puisque deux jours plus tard il est vraiment mort.

S'il y a une chose dans ce monde que je ne supporte pas, c'est l'injustice. Là, j'en ai une preuve flagrante, ornée de cruauté gratuite. Je refuse par principe de publier les photos du corps d'Anton, mais, par principe aussi, je veux partager la vidéo. 

Repose en paix Anton, et j'espère que la mobilisation impressionnante de tes proches et de tes amis t'apportera un jour la justice que tu mérites.


 


dimanche 21 octobre 2012

Bruce Springsteen, ou quand le fantasme se mêle au réel

Nouvel article, nouveau thème, nouvelle réflexion.

Vendredi 19 octobre 2012, j'ai vécu un truc unique que j'ai très envie de partager avec la Terre entière, voire même avec les extraterrestres si ça les branche et tout le reste du système solaire aussi. Mais, avant de rentrer dans le vif du sujet, je vais essayer d'en planter le décor.

Donc, depuis plus de 16 ans, je suis cinglée de Bruce Springsteen. À l'époque, au milieu des années 90, j'étais en mode monomaniaque, hystérique, fanatique d'un boys band extrêmement populaire en Europe et surtout en France, qui s'appelait les Worlds Apart, pour ne pas les citer. Ma mère, avec qui je vivais, commençait à se demander combien de temps cette folie allait durer, combien de fois elle devrait corrompre les amies de mon grand frère pour m'accompagner aux concerts, combien de temps elle devrait encore endurer la « musique » à fond dans ma chambre. Ils étaient beaux, chantaient (de la merde) correctement, parlaient d'un amour parfait comme on peut en rêver plus ou moins consciemment à 10 ans, avaient l'air d'être des petits copains parfaits, bref, tout ce qu'il faut pour entretenir la passion chez ces milliers de jeunes filles dont je faisais fièrement partie.

Jusqu'à cette journée de l'été 1996, sur une route de campagne déserte en voiture avec mon père. Sans rien dire, il a mis l'album « Darkness On The Edge Of Town » et l'effet sur moi a été rapide comme la foudre, littéralement. Dès les premières notes du premier morceau, je me suis sentie connectée, concernée, comme envoûtée, sans comprendre un traître mot de ce que j'entendais sortir de l'autoradio. Pourtant mon niveau d'anglais, même à l'époque, était relativement avancé. D'ailleurs, permettez-moi ici une petite parenthèse pour dire un grand merci aux Worlds Apart et à leur prose si peu évoluée, qui m'ont permis d'améliorer mon niveau dans la langue de Shakespeare, en traduisant rigoureusement toutes leurs chansons dans un cahier, dont je prenais encore plus soin que de mes cahiers d'école (déjà à l'époque, la musique passait loin devant) ! Fin de la parenthèse, merci pour votre patience.

 
Donc, après avoir passé un mois à casser les pieds de mon père pour écouter constamment  « Darkness » et « Born To Run », qu'il m'a fait découvrir le lendemain, je suis rentrée chez moi, ai arraché vigoureusement tous les posters des gars sus-mentionnés qui recouvraient les murs de ma chambre, sous les yeux circonspects de ma mère, et me suis immédiatement plongée dans la vie et l’œuvre de Springsteen. 

Le premier des 11 concerts que j'ai vus de lui, en 2002, a achevé de me faire inexorablement tomber dans la marmite pour ne plus jamais en sortir. À la limite, je suis heureuse de m'y enfoncer un peu plus chaque jour, ça me fait du bien d'avoir un genre d'idole comme lui, qui prône des valeurs auxquelles j'adhère aussi personnellement, qui respecte énormément son public, qui n'a jamais fait deux fois le même concert en 40 ans de carrière et qui prend un plaisir évident à jouer au moins 3 heures tous les soirs. C'est le contrat qui le lie à son public, comme il le dit lui-même. Vous en connaissez beaucoup des artistes de cette envergure qui voient les choses comme ça, en vendant leurs tickets deux fois moins chers que les autres de la même trempe? Je pense que non, tout simplement parce qu'il n'en existe pas d'autre.

Vous constatez donc que je suis sévèrement atteinte de springsteenite, probablement sous une forme aiguë qui plus est. Et c'est un truc que j'assume très bien, merci. Mais ma fan attitude a ses limites, heureusement. Je veux qu'il reste à sa place d'idole dans ma vie, qu'il continue à me servir de refuge intérieur quand j'en ai envie ou même besoin. Dans cette optique-là, je me fous de savoir à quel hôtel il va, s'il aime les pois-chiches ou s'il préfère la vodka ou la grenadine (ou peut-être les deux ensemble? mmm!). Je laisse ça à d'autres, sans les juger pour autant (enfin, pas beaucoup, juste un peu...). En discutant avec d'autres fans du monde entier, je passe souvent pour une énigme. J'aime intensément sa musique (pas tout, lui aussi est capable de sortir des bouses, surtout ces dernières années, mais c'est un autre sujet), j'adore plus que tout le voir en concert partout où je peux, je m'intéresse beaucoup à ses positions sur la politique, la société américaine dans laquelle il vit (qui me fascine aussi) et s'est façonné, j'ai lu beaucoup d'ouvrages qui lui sont consacrés, mais je me contrefous de lui serrer la main ou de lui demander un autographe.

Ça va même plus loin, non seulement ça ne m'intéresse pas du tout, mais c'est carrément un truc auquel je refuse de me laisser aller. Il est trop bien installé sur son piédestal dans mon panthéon personnel, et je veux qu'il y reste encore longtemps. Alors, plutôt que d'avoir des pensées ou des fantasmes irrationnels suscités par plusieurs artistes ou autres personnages publics, j'aime autant tout concentrer sur un seul, lui. Comme quoi, j'ai toujours ce côté monomaniaque en moi, mais plus l'hystérie qui allait avec lorsque j'avais 10 ans. Vous me direz, je n'ai jamais pris cette décision de mon plein gré, c'est elle qui s'est imposée à moi naturellement. Il y a bien d'autres artistes qui me passionnent (presque) autant que Springsteen, comme Tom Waits, The Clash ou, dans un autre domaine, Charles Bukowski. Mais j'ai beau connaître leur vie par cœur, ils ne me procurent pas la même sensation de familiarité, de vieux copain ou de réconfort, que j'aime tant avec Springsteen.

Sauf que vendredi 19 octobre 2012, mon monde réel a mis un pieds dans mon fantasme. Laissez-moi vous dire que c'est une expérience incroyable, un truc nouveau pour moi, que je n'aurais jamais pu imaginer.

Je suis allée le voir en concert à Ottawa, avec une copine fan aussi. C'était son anniversaire ce soir-là et elle a fait le voyage de Paris presque juste pour ce concert. Il fallait donc qu'on s'organise pour que cette soirée soit au top. Pour commencer, on se devait d'être dans le pit, cette partie du parterre qui se trouve juste devant la scène. Sauf qu'en Amérique du Nord, contrairement à l'Europe, ce n'est pas le système du premier arrivé premier servi, mais un tirage au sort. Donc là, on était 700 à vouloir y aller, pour seulement 500 places... On a eu beaucoup de bol, parce qu'à 15 personnes près, on n'y était pas. Mais la chance a décidé de nous sourire, ce qui était une première victoire dans cette soirée, donc on s'est retrouvé idéalement placé à 4 mètres du micro de Springsteen.

La foule avait l'air très cool, les gens étaient aussi impatients que nous que le show commence, et personne n'a été déçu de l'entrée en matière du Boss et de son E Street Band, enrichi sur cette tournée d'une section de cuivres, de choristes et d'un percussionniste. The Promised Land, The Ties That Bind, No Surrender et Hungry Heart pour commencer, et paf ! une première petite claque derrière la tête, histoire de me rappeler qui j'ai devant moi. Le pit est comblé, joyeux, une ambiance bon enfant y règne, tout est parfait. Évidemment, avec ma copine, on connaît bien les petites habitudes de Springsteen pendant ses spectacles. On sait, par exemple, qu'il aime bien faire monter une fille du public sur scène pendant qu'il joue Dancing In The Dark, vieux tube du milieu des années 80. Histoire de tenter notre chance, enfin surtout celle de ma copine, on avait préparé une belle petite pancarte pour attirer son attention, qu'on brandissait entre chaque morceau, mais on aurait dit que Bruce avait décidé de ne pas regarder dans notre direction. Pas grave, on continue de savourer chaque seconde et de s'éclater. Suivent We Take Care of Our Own, Wrecking Ball, chanson titre du dernier album, Death to My Hometown puis My City of Ruins, qui comprend en introduction un magnifique hommage au regretté saxophoniste de la première heure, Clarence Clemons, décédé subitement en juin 2011. Puis Spirit in the Night, en hommage à tous les fantômes qui accompagnent chaque personne présente dans la salle (dixit Bruce). Pour rester dans la même période, on a eu droit à un excellent E Street Shuffle, joué sur demande du docteur qui a débouché l'oreille de Bruce l'après-midi même, alors qu'il n'entendait plus rien (!), suivi du cinglant Jack Of All Trades, malgré un tempo très tranquille.

À mon humble avis, c'est à ce moment-là que Bruce a décidé de vraiment faire décoller le concert, puisqu'il nous a balancé une vielle version de Prove It all Night, avec la même intro que sur la tournée de 1978. Décoiffant, c'est le moins que l'on puisse dire, et ponctué par un solo grinçant de Niels Lofgren. Wow. Juste après cette deuxième claque, il m'en assène directement une troisième, en jouant Candy's Room, une de mes chansons préférées depuis toujours, que je n'avait jamais vue en live. Bon. On pourrait croire qu'après 10 concerts je devrais savoir à quoi m'attendre, mais non. La seule chose que je sait en entrant dans la salle, c'est que ça va être unique, et sûrement mémorable. Et encore une fois, je ne me suis pas trompée. Il continue avec Darlington County, Shackled And Drawn, Waitin' On A Sunny Day pendant laquelle il fait monter sur scène deux petits garçons pour chanter le refrain et qui lui volent finalement la vedette. D'habitude, je n'aime pas trop ce moment avec un enfant, mais je dois avouer que ces deux frères étaient très drôles. Ensuite, pour satisfaire les nombreuses demandes que l'on pouvait voir sur des pancartes, il a enchaîné avec Drive All Night, très belle chanson et très beau moment. Viennent ensuite The Rising et Badlands, qui terminent le concert avant les rappels. En fait, ce n'était pas vraiment un rappel puisque le groupe n'a pas quitté la scène, histoire de ne pas perdre de temps, mais en entendant les premières notes à l'harmonica de Thunder Road, on a bien compris que c'était la dernière ligne droite de la soirée.

Là, Springsteen s'est dirigé vers le pit et a fait signe à une fille du public de s'approcher de la scène avec la pancarte qu'elle portait pour demander une chanson. Horreur ! En voyant le titre, Queen Of The Supermarket, j'ai tout de suite pensé à une blague, puisque c'est à mon avis un des morceaux les plus inutiles du catalogue springsteenien. Même lui l'a dit, cette chanson n'a jamais été réclamée pendant un show, jamais, tellement jamais qu'il ne l'avait jouée qu'une seule fois auparavant. Mort de rire, il a décidé de la jouer en solo pour faire plaisir à la fille qui travaillait effectivement dans un supermarché. Mon horreur s'est transformée en sourire, puisque après tout, très peu de personnes peuvent se vanter de l'avoir entendue en live ! Et puis ça a provoqué en moi une impression spéciale. S'il est capable de jouer ce genre de niaiserie sur demande, alors il est capable de tout. Encore trois petites chansons, et non des moindre, et il allait me le prouver. Il continue donc avec We Are Alive, Born To Run et Glory Days, pour le plus grand bonheur de tous, y compris les gens moins fans du public qui ne connaissaient que la partie mainstream de ce bon vieux Bruce.

Et là, soudain, les premières notes de Dancing In The Dark. Mon cœur s'est mis à battre la chamade et j'ai secoué ma copine pour qu'elle brandisse sa pancarte un peu plus haut. Bruce l'a vue, son guitariste aussi qui s'est même mis à rire en voyant ce qui était écrit ( It's my 26th birthday, so please marry me dance with me !). Le morceau progressait, arrivait vers la fin, je n'en pouvais plus, j'étais au bord de l'apoplexie. Et ENFIN, Bruce s'est dirigé directement vers nous, en pointant l'index vers ma copine et son panneau. Putain, c'est pas vrai. Je rêve. J'hallucine. C'est impossible, ça n'arrive qu'aux autres. Sauf ce soir-là, où ça nous est arrivé à nous, enfin à elle. Mais à moi aussi, ça a fait quelque chose.

J'étais au milieu de 18000 personnes, devant mon idole, cette superstar mondiale qui a changé la vie de tant de personnes en accomplissant la sienne, qui a vendu des millions de disques, créé des tubes intemporels, fait des concerts sur tous les continents, fait rêver des milliers de filles et de femmes, et le voilà qui danse avec ma copine. Rien que le fait de l'écrire, j'en ai encore la chair de poule. Ma copine en question, qui fait par définition partie de ma vie réelle, quotidienne, dansait avec Bruce Springsteen. En fait, c'est comme si c'était moi qui dansait avec lui, sauf que la scène se passait devant mes yeux, et ça donne une perspective incomparable. L'objet de mes fantasmes (pas sexuels les fantasmes, bien qu'il soit doté d'une paire de fesses de compétition, malgré ses 63 ans) était sous mes yeux, mélangé avec ma vraie vie. J'avais une boule dans le ventre terrible, je tremblais comme une feuille mais en plus, il fallait que j'assure le côté souvenir pour ma copine, en prenant des photos ! Le résultat est à l'image de la situation, un peu flou mais pas trop, plein de bonheur sur le visage de ma copine et aussi celui de Bruce, pas très cadré mais tellement inoubliable !

Pour moi, c'était le comble du fantasme. S'en approcher très très près, mais ne pas y toucher, pour ne pas qu'il dégringole de son piédestal et se retrouve au même niveau que les autres. Je souhaite à quiconque qui a lu ces lignes de vivre un jour une telle chose, tellement c'est bon.

Petit souvenir pour ma copine, pour moi et pour qui veut partager notre bonheur.



Pour ceux qui aiment Springsteen, venez faire un tour sur le forum francophone Land of hope and dreams, truffé d'infos et de gens cool !

mardi 28 août 2012

Pourquoi une maudite Française migre au Québec ? Eléments de réponse.

Pour faire suite à mon billet sur le français au Québec, je me suis dis qu'il serait logique que je parle un peu de mon parcours, pourquoi j'ai choisi de quitter mon pays pour m'installer de l'autre côté d'un océan, etc. Histoire de remettre la balle au centre et de dire que, si tout n'est pas rose au Québec, tout est loin d'être parfait en France.

Je me suis installée à Montréal il y a quasiment quatre ans, en plus d'avoir terminé mes études universitaires à l'Université du Québec à Trois-Rivières, donc j'estime avoir eu pas mal de temps pour observer ces deux nations cousines. En fait, je ne suis pas sûre qu'elles soient si " cousines " que ça, les défauts de l'une étant les qualités de l'autre. Un peu comme deux entités complémentaires. En fait, en y réfléchissant un peu, on devrait être capable de crée une sorte d'utopie en créant un savoureux mélange équilibré, un genre de Franbec ou de Québrance.

Il y a une dizaine d'années, je n'étais pas loin d'avoir la possibilité d'aller à l'université, mais j'étais simplement incapable d'imaginer mon avenir, ma vie d'adulte. Trou noir plein d'angoisse à chaque fois que j'y pensais. Impossible de m'imaginer indépendante, avec un boulot, un appartement, éventuellement un conjoint et ma propre famille. Pourtant une chose est sûre, j'en mourais d'envie et je sentais que j'allais bientôt avoir besoin de m'envoler du nid maternel. Je rêvais depuis des lustres de travailler un jour dans le milieu musical, mais je sentais inconsciemment que quelque chose en France allait m'empêcher d'avancer. Après une adolescence joyeusement borderline, j'ai finalement atteint les bancs de l'université. Bien que ça fasse un bien fou de trouver une voie dans laquelle on se plaît et qui nous passionne, le trou noir et béant de mon avenir restait là dès que j'y réfléchissais un peu, et je commençais sérieusement à me poser des questions. Où est le problème? Y a-t-il seulement un problème? Est-ce la société dans laquelle je vis? Ma famille? Mes amis? La société ( et pas seulement elle ) nous pousse à faire des études supérieures, mais les débouchés professionnels sont extrêmement limités. Tous les employeurs demandent de l'expérience mais aucun d'entre eux ne veut en offrir. Pratique, hein? On va aller loin comme ça ! Et rien au niveau de l'enseignement universitaire n'est fait pour rapprocher les études et les étudiants de leurs futurs milieux professionnels ni des gens qui les composent.

Je tournais en rond jusqu'au jour où une de mes professeurs de fac m'a demandé pourquoi je ne partais pas étudier un an à l'étranger pour terminer mon diplôme en échange universitaire. Est-ce que mon questionnement intérieur transparaissait dans mon comportement ? Quoi qu'il en soit, son idée a germé en moi comme un haricot magique, très rapidement. Elle avait trouvé la solution ! C'est ça qu'il me fallait, aller voir comment se passe la vie ailleurs ! Je pouvais choisir parmi plein de pays européens proches de la France, mais j'ai jeté mon dévolu sur le Québec, car c'était la destination la plus éloignée. En même temps que de réaliser les bienfaits que ce voyage allait m'apporter, il est simplement devenu une évidence. C'était ça, la solution pour apaiser mon malaise et mon spleen, pour me faire prendre du recul sur ma vie, les choses qui la rendent moins facile à gérer, les gens qui s'obstinent à vouloir la contrôler.

Le choc culturel a été immédiat. "Choc" est un terme un peu fort, mais disons que deux différences majeures m'ont sauté aux yeux dès les premiers jours de mon séjour québécois. D'abord, la chaleur naturelle avec laquelle les gens m'ont accueillie. Je me souviendrai toute ma vie du choc électrique qui m'a traversée lorsque, assise à la terrasse d'un bar, la serveuse ma demandé si j'allais bien avant de prendre ma commande. Euh, pardon ?? C'est bien à moi que tu parles, là, je n'hallucine pas ?? Ce n'est pas à Paris qu'on entendrait ça !
L'autre chose qui m'a énormément soulagée est le fait que la plupart des commerces ou entreprises recherchaient tous des employés. Des offres d'emploi partout ! Ca non plus, ça n'est pas très parisien ! C'est sûr que ça n'était sûrement pas que des jobs incroyables, mais au moins il y en avait, des jobs ! Quand je pense qu'à Paris je me suis même fait recaler du McDo ! Ca met vraiment un coup au moral un truc pareil !

Ce sont donc deux gros poids qui sont descendus de mes épaules dès ma première semaine au bout de mon monde. Rien que ces deux choses-là, pourtant simples à prime abord, normales diront d'autres, ont suffi à déboucher la vision que j'avais de mon avenir. Je me suis remise à croire en mon avenir, et le cercle vicieux dans lequel je me perdais s'est tout à coup transformé en cercle vertueux. Moins de stress = retour de mes rêves = retour des ailes qui poussent dans le dos = j'ose tout simplement prendre contact avec certaines personnes = le culot paye ! = me voilà à réaliser une partie de mon rêve professionnel en travaillant pour un de mes groupes français préférés de passage au Québec : Debout Sur Le Zinc ! Et voilà !

Bref, je n'ai pourtant jamais eu l'impression d'avoir des envies et des projets démesurés, mais ces temps-ci rien en France n'est fait pour faciliter l'insertion des jeunes dans la vie adulte. Nos rêves fous sont remplacés par des souhaits bien trop terre à terre : je ne trouve pas qu'il soit normal à 20 ans de juste espérer être capable de payer un loyer avec son salaire. C'est aberrant. On verra si le changement de cap de la politique française changera un peu ça dans prochaines années, sachant que la situation ne pourrait que difficilement être pire !



dimanche 19 août 2012

Recette de la meilleure pâte à crêpes du monde !

En ce dimanche après-midi tranquille, en mode digestion après avoir dévoré un bon gros brunch maison, je me dis que je pourrais bien partager le clou de notre repas convivial : la recette de pâte à crêpes de ma grand-mère! C'est enfantin et tellement bon!

Ingrédients:

- 300g de farine
- 100g de sucre
- 6 oeufs
- 75g de beurre-noisette ( fondu, à peine bruni ) + 2 cuillers à soupe d'huile
- 1/2 l de lait
- 1/2 cuiller à café de sel
- 1 grosse cuiller à soupe d'extrait de vanille, ou d'amande, ou d'orange ou de citron
- l'équivalent de 2 gorgées de bière blonde

OK, je fais quoi avec tout ça?

- mélanges la farine et le sucre
- ajoutes le lait
- puis les oeufs
- puis l'huile et le beurre
- puis la vanille
- enfin la bière

laisses reposer au moins 2 heures et fais des crêpes assez fines, ça en fera plus et elles n'en seront que meilleures !

Aujourd'hui, les convives autour de ma table avaient de 7 à 35 ans, tout le monde a été convaincu !

Bon appétit :)


vendredi 17 août 2012

Je chiale pas: je constate!

Premier article, et je me demande de quoi j'ai envie de parler en priorité. Musique? Politique? Stratosphère? Botanique?

Non.
Je vais rester logique et entamer les hostilités avec le sujet qui m'a poussée à créer ce blog : la langue française au Québec, ma terre d'adoption adorée. En plus ça tombe bien, on est en pleine période d'élections provinciales, et il va sans dire que la protection de la francophonie est un des sujets favoris des différents candidats.
Du coup, je vais mettre les pieds dans le plat d'entrée de jeu : chers candidats, messieurs et mesdames les québécois, vous vous trompez de combat et, par la même occasion, vous fourrez le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. L'enjeu ne doit pas être de forcer tout le monde à s'exprimer en français ou d'empêcher les gens d'inscrire leurs enfants dans des écoles anglophones.
Non, en prenant le problème par ce bout-là, vous manquez l'étape la plus cruciale et vous perdez une bonne partie de votre crédibilité.
Il faut commencer par le commencement, la base, les fondations. Je suis circonspecte de n'avoir jamais entendu PERSONNE soulever, ou même juste effleurer, la question de la qualité de la langue française au Québec. C'est d'autant plus inquiétant que pas une semaine ne s'écoule sans que je frôle l'arrêt cardiaque en découvrant des fautes toutes plus abominables les unes que les autres, partout.

J'ai terminé mes études universitaires il y a 5 ans dans un établissement du réseau des Universités du Québec, et pendant toute l'année, j'ai été révoltée par la médiocrité du niveau de langue des corps professoral et administratif. Grammaire, syntaxe, orthographe, tout y passait. Je regrette aujourd'hui beaucoup de ne jamais avoir fait de remarque, ne voulant surtout pas passer pour la maudite Française qui se croit au-dessus des autres. J'ai constaté assez rapidement que tout compte fait, ça n'est pas si étonnant. Plusieurs étudiants dans mon entourage durant cette année suivaient des cours en enseignement. Certains même se destinaient à l'enseignement à l'école primaire. Ils allaient donc à leur tour apprendre aux jeunes enfants à écrire et j'ai été sidérée de constater que même eux n'étaient souvent pas capables de rédiger un texte d'une page sans faire de fautes.

Dans les médias, aussi. Tous les jours, je lis un journal. Parfois des trucs sérieux, genre La Presse, d'autres plus généraux, style Métro ou 24 Heures, ou encore (beaucoup plus rarement car trop racoleur pour moi) le Journal de Montréal. Je dirais qu'en moyenne, je trouve des fautes deux fois par semaine. Je trouve ça énorme (j'ai même déjà trouvé une faute dans... des mots croisés !). Si même des rédacteurs, qui sont quand même payés pour écrire, font des fautes d'accord, alors où va-t-on? Je pourrais aussi parler des journalistes à la télé, qui font sans cesse de fausses liaisons qui me causent à chaque fois des palpitations. Je serais curieuse de leur faire faire une dictée, tiens, juste pour voir.

C'est tout aussi terrible dans les publicités. Dans un sens c'est même pire, car c'est à la vue de tous, y compris des plus jeunes, partout, tout le temps. Dans le métro, la rue, les restaurants, les magasins, les journaux (tiens, encore eux?). Je ne pourrai jamais oublier cette campagne d'affichage d'un fournisseur de téléphonie bien connu au Québec (je ne suis plus certaine duquel il s'agit, je m'abstiendrai donc, pour une fois, de citer un nom). L'affiche mesurait une dizaine de mètres carré (euh, choc des cultures: disons une trentaine de pieds carré) et on lisait en plein milieu, dans le slogan, en grosses lettres capitales: BEAUCOUPS. Non mais sans déconner ! Personne ne relit jamais ces trucs avant de nous polluer avec? Déjà vu aussi, de vilaines erreurs sur des affiches promotionnelles pour des écoles ! Rien que de l'écrire, ça m'énerve.

Histoire de compléter mon tour de la société, je terminerais sur le monde du travail. J'ai eu la chance de virevolter de job en job pendant mes deux premières années à Montréal, alors j'en ai vu des vestiaires et des tableaux d'affichage interne. J'en ai reçu des courriels de certains supérieurs hiérarchiques. On m'en a donné des consignes écrites, des menus (oui oui, même dans des menus !), des formulaires à remplir. Vous imaginez bien que, là encore, notre belle langue en prenait pour son grade.

J'aurais pu ajouter ici un paragraphe sur la guéguerre qui est faite contre les Français à cause des mots anglais qu'on utilise couramment. Est-ce que ça voudrait dire que vous ne réalisez pas que le vocabulaire québécois en est truffé lui aussi? Je vous laisse chercher, tiens.

Tout ça pour dire, messieurs-dames du Québec, hommes et femmes politiques, journalistes, publicitaires, citoyens, s'il vous plaît, n'essayez pas de bâtir des principes et des règles stupides sur des fondations pourries ou inexistantes, est-ce que vous tenteriez le coup en construisant votre maison? Bien sûr que non, alors pourquoi le faire avec votre société, et du coup, l'avenir de vos enfants?



Quelques illustrations:

J'ouvre le bal ce matin avec une bonne nouvelle concernant Avril Lavigne, publiée hier le 23 août 2012 dans 24 H.
Tout est dans le titre.




On en remet une petite couche aujourd'hui, le 24 août, ma source est toujours la même ( intarissable? )
On nous parle ici de Marois, son prénom étant... Pauline! Bravo!


Merci La Presse ! Aujourd'hui, un grand classique. C'est tombé sur La Presse, mais ça aurait pu être n'importe où ailleurs, je vois cette faute tous les jours.


Celle-là est, je pense, ma préférée !


McDo:






Je ne sais pas d'où vient celle-ci, mais elle est belle ! Merci à Sopinky pour la photo.